Bangalore : de la Cité-Jardin à la technopole

L’asphalte noirâtre, rendu luisant par une pluie récente, exhalait un effluve d’hydrocarbures. En chemin, nous passâmes devant un temple hindou situé en bordure d’un rond-point entouré de végétation, et nous demandâmes à notre conducteur de s’arrêter quelques minutes, le temps de prendre des photos. Rajeev y consentit, visiblement un peu surpris. Je suppose que cette bâtisse n’avait pour lui rien de remarquable, mais elle s’avérait pour nous totalement dépaysante.

Constantin Louvain, Un Voyage d’Affaires au Karnataka.

Le nom de Bangalore (ou Bangaluru), cœur économique et technologique du Karnataka, au Sud de l’Inde est évoquée pour la première fois dans une pierre du Xe siècle vantant les mérites d’un guerrier, retrouvée à Begur. Bangalore est désigné comme étant le lieu d’une bataille. Les siècles ont passé, et cela ne change pas. Bangalore reste le lieu d’un combat, d’une lutte entre progrès techniques et impact environnemental.

Temple Hindou à Bangalore
Crédit photo : Prasanna Devadas

Dans Un Voyage d’Affaires au Karnataka, Constantin Louvain nous emmène dans cette ville, capitale de l’état du Karnataka. Entre carrefour et choc civilisationnel, cette contrée qui attire les grandes firmes technologiques (biochimie, aérospatiale ou informatique) fascine. Et puisque Constantin Louvain vous y emmène pour les affaires, nous nous proposons de mettre notre casquette de guide touristique.

Bangalore, cité-jardin en mutation.

Avec son climat tropical, et la mousson, l’environnement de Bangalore est propice à la végétation. Ce n’est pas sans raison qu’on appelle Bangalore la Cité-Jardin. Après les années 1950, une activité textile s’implante en ville. La ville devient la capitale du Karnataka, état nouvellement créé en 1956 et se transforme en pôle industriel aéronautique. Les entreprises de télécommunication et de machine-outils se penchent également sur la ville, ainsi que l’industrie militaire.

De fil en aiguille, Bangalore se transforme et devient dans les années 1990 le pôle indien des technologies de l’information. En 2006, des entreprises comme Google, Microsoft, Amazon, IBM, Capgemini et d’autres investissent les environs. Un parc d’activités, Electronics City est installé au Sud-Est. Ce technopole qui occupe 136 hectares, génère plus de 10 000 emplois.

Bâtiments à Bangalore
Crédit photo : Bishnu Sarangi

Par ailleurs, la ville est un pôle universitaire important et réputé. On y trouve la prestigieuse Indian Institute of Science. Vous l’aurez compris, Bangalore est la Silicon Valley indienne. Une véritable concentration de compétences et de talents.

Mais une telle mutation ne se fait pas sans heurts. Et Bangalore paie le progrès au prix de la pollution qui règne en ville. L’industrie informatique produit 20 000 tonnes de déchets par an, traités par le secteur informel qui les brûle à l’air libre. Par ailleurs, selon certaines estimations gouvernementales, les réserves d’eau souterraines de Bangalore devraient être quasiment taries.

Bangalore et son patrimoine riche

Bangalore, ce n’est pas seulement une technopole. C’est également une ville riche culturellement. On y trouve le temple d’ISKCON Sri Radna Krishna, très beau complexe conçu pour propager la conscience de Krishna à travers le monde. Le temple Bull, et sa célèbre statue de Nandi le taureau sacré s’y trouve également. Besoin de calme et de sérénité ? La Pyramid Valley vous accueille…

Vous pourrez également visiter le musée industriel et technologique de Visvesvaraya ou flâner dans le marché gargantuesque de la Commercial Street. Les amoureux de la nature peuvent également voir du côté du jardin botanique de Lalbagh ou jeter leur dévolu sur le parc national de Bannerghatta.

Statue de Nandi dans le temple Bull à Bangalore.
Crédit photo : Mohit Mourya

Amateurs de cricket, vous pourrez y encourager l’équipe des Royal Challengers Bangalore qui évolue en Indian Premier League ou applaudir les tenniswomen et tennismen qui se disputent l’Open de Tennis de Bangalore qui s’y tient chaque année.

Le cas du Dr. Rajkumar

Rajkumar, de son vrai nom Singanalluru Puttaswamayya Muthuraju est un acteur et chanteur indien né en 1929. Sa filmographie, impressionnante, s’étire de 1946 à 2000. Cet artiste, très prolifique, est l’une des figures de Sandalwood, l’industrie du cinéma basé à Bangalore qui diffuse des films en kannada, notamment.

Le kannada est la langue officielle du Karnataka. Il s’agit d’une langue dravidienne (famille de langues parlées dans le sud de l’Inde) qui comptabilise 40 millions de locuteurs. Une langue, c’est un élément constitutif de l’identité d’un peuple. Et par sa popularité, on peut imaginer que Rajkumar, cet acteur qui s’adresse aux habitants du Karnataka dans leur langue, était l’objet d’un réel culte.

Sans entrer dans des considérations politiques, n’oublions pas que Bangalore a beaucoup changé en attirant des entreprises étrangères. Un homme comme Rajkumar ne pouvait qu’enflammer les passions nationalistes de la population locale. Aussi sa mort à 76 ans en 2006 avait de quoi susciter l’émotion la plus vive.

Tout cela est très instructif, mais vous vous demandez probablement ce que Rajkumar vient faire dans tout ça. Nous n’en dirons pas plus, vous le découvrirez bien en lisant Un Voyage d’Affaires au Karnataka, de Constantin Louvain.

Couverture Un Voyage d'Affaires au Karnataka, de Constantin Louvain.
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Conclusion

Le Karnataka et Bangalore sont des lieux passionnants à visiter. Bangalore semble être la traduction visuelle de la lutte qui marque cette ville. Entre son désir de développement scientifique et la nécessité de conserver son intégrité, notamment environnementale. Constantin Louvain, dans son ouvrage dresse un portrait fascinant des habitants de la ville, via son rapport au travail, activité qui occupe tant de notre temps.

Bangalore, entre bureaux et temples, un dépaysement total.

Sources :

J-Ph. LESTANG, “Le projet “infrastructure métropolitaine de données spatiales” de Bangalore”, Villes en développement : bulletin de la coopération française pour le développement urbain, l’habitat et l’aménagement spatial n°71, 2006

S.BARONE, Les 9 choses incontournables à faire à Bangalore, Génération Voyage, 2020

S. RELPH, Indian villages lie empty as drought forces thousands to flee, The Guardian, 2019

Bangalore, poubelle électronique de l’Inde ? RFI, 2013

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